Enfin, j’ai pu m’entretenir avec une légende du métal québécois, le batteur de Voivod, Michel Langevin. 2013 marque le trentième anniversaire du groupe et également la sortie du premier album avec Dan Mongrain et le retour de la «Blower Bass» de Blacky, l’excellent Target Earth. Away est un type très volubile et sympathique, il nous parle des débuts du groupe, du nouveau disque, de l’avenir du groupe ainsi que du fameux «Lac Rouge» situé derrière l’usine Rio-Tinto (Alcan) à Saguenay… En voici des extraits et vous pouvez entendre l’entrevue complète dans un lien plus bas.
Boulevard Brutal: Michel, on s’était vu cet été à la Zone Métal de Chicoutimi, mais avec tous les problèmes avec la température, nous n’avions pas eu vraiment eu le temps de jaser… Tu me replaces probablement, je suis le p’tit cul de Bégin qui te harcèle depuis 30 ans…
Away: Ha! Ha! Ha!
Boulevard Brutal: Voivod fête son trentième anniversaire cette année et Target Earth sort le 22 janvier. L’album est prêt depuis un bout de temps, tu devais avoir hâte que ça sorte, non?
Away: Bien on a fini le mixage à l’été 2012 et puis idéalement on voulait le sortir pour la tournée européenne en octobre, mais l’horaire était trop serrée. On a finalement sorti un simple en vinyle pour Mechanical Mind qui s’est bien vendu puis comme on s’est formé en janvier 1983, on a décidé d’attendre pour le trentième de Voivod pour sortir l’album.
Boulevard Brutal: Donc ça fait trente ans cette semaine?
Away: C’est vrai, l’audition de Snake a eu lieu le 7 janvier 1983.
Boulevard Brutal: Était-il le seul en audition?
Away: Le seul. On lui avait demandé d’apprendre les paroles de The Ripper de Judas Priest et il l’a chanté un peu comme Johnny Rotten des Sex Pistols et on trouvait ça intéressant. Blacky, Piggy et moi jammaient déjà depuis novembre 1982 et on a découvert Snake à la ligue d’improvisation du cégep de Jonquière. Il jouait le rôle d’un ver qui se faisait attraper par la lumière d’une flashlight. Il faisait de l’impro avec ce qui est devenu le Groupe Sanguin, il était très théâtral et c’est ce qu’on cherchait.
Boulevard Brutal: Snake ne chantait pas à l’époque, c’était son premier band?
Away: Oui. Après son impro, il a eu une ovation, je suis allé le rencontrer et je lui demandé si il chantait, il m’a dit qu’il pouvait essayer. Il est venu au local et on a vraiment aimé ce qu’il faisait.
Boulevard Brutal: J’ai reçu Target Earth cette semaine et je crois que c’est un classique en devenir. Comment ça s’est passé pour la composition de l’album?
Away: C’était très naturel. On a fait pas mal de tournées avant d’être assez confiant pour composer. On a fini ça au Club Soda avec ce qui est devenu l’album live Warriors Of Ice. Début 2010, on a commencé à penser à composer puis le tout a commencé avec une maquette de Blacky et Chewy (Dan Mongrain). Snake et moi étions vraiment impressionné, ça nous ramenait directement à l’époque de Dimension Hatröss. Ensuite on a fait plusieurs sessions d’improvisation que l’on a enregistré, et plusieurs de ces enregistrements ont fini sur l’album. Blacky et Chewy avaient aussi des chansons individuelles, et tout ça a fini en matériel de Voivod. Nous avons finalement entré en studio au début 2012 au studio de Pierre Rémillard, un studio dans le nord de Montréal. Nous étions isolés et on a travaillé pendant 17 jours sans arrêt.
Boulevard Brutal: Il y a de quoi de particulier sur Target Earth, votre première chanson en français, Corps Étranger. Est-ce que c’était une demande spéciale d’un membre du groupe ou vous en étiez juste rendus là?
Away: On en parlait depuis déjà un moment, on a déjà utilisé des titres ou des phrases en français dans nos chansons. En 2010, on a fait un spectacle aux Francofolies avec Malajube ou l’on interprétait des chansons de ce groupe. On s’est rendu compte que la musique de Voivod pouvait bien sonner en français et ça nous a donné l’idée.
Boulevard Brutal: Et cette pièce me fait penser d’ailleurs à la piéce Ripping Headaches (paru sur l’album RRRROOOAAARRRR)…
Away: Exactement. Après l’écriture de 4 ou 5 morceaux, je me suis aperçu que notre stock était très progressif à la King Crimson avec des tempos 7/8. J’ai alors demandé à Blacky et Chewy de composer de la musique plus punk, dont une chanson avec un beat Motorhead qui est devenue Kluskap O’Kom, qui parle de la mythologie Micmac, et une autre plus dans le style Ripping Headaches qui est maintenant Corps Étranger.
Boulevard Brutal: Parlons de Jason Newsted. Vous avait fait trois albums avec lui dont deux avec des enregistrements de musique de Piggy, alors décédé. Tout semblait fonctionner, alors pourquoi ne pas avoir continuer avec lui?
Away: En fait je ne sais si lui voulait continuer Voivod sans Piggy. Les deux s’entendaient vraiment bien musicalement parlant et après l’enregistrement de Katorz, nous étions tous épuisés par l’expérience. On savait cependant que l’on avait comme mission de terminer l’album Infini dont on avait commencé à travailler avec Piggy en 2004. Snake et moi avons par la suite pris du recul. Quand on s’est reformé avec Blacky et Chewy, c’était plus dans le but de jouer des tounes des années 80 et faire quelques spectacles. Ça s’est finalement transformé en super aventure.
Boulevard Brutal: On s’était rencontré pendant un spectacle de Heaven And Hell au Centre Bell et à l’époque tu m’avais dit que tu voulais monter un spectacle hommage à Piggy avec plein de guitaristes invités dont Andreas Kisser de Sepultura. Est-ce que c’est la rencontre avec Dan Mongrain qui a fait que le projet ne s’est jamais réalisé?
Away: On a essayé, mais c’était un vrai casse-tête de pouvoir avoir tout le monde en même temps. On s’est donc concentré à faire une tournée mondiale avec Blacky et Chewy et aussi à finir Infini avec Jason. C’était déjà beaucoup de travail. On a quand même sorti quelques trucs dont le dvd en spectacle à Tokyo intitulé Tatsumaki et à la fin 2009 on a sorti Warriors Of Ice en cd, et finalement la compagnie Alternative Tentacles qui a sorti notre premier démo, To The Death 84 en 2011. Nous ne trouvions pas la bande-maîtresse, mais finalement quand Blacky est revenu, c’est lui qui l’a trouvé.
Boulevard Brutal: Le retour de Blacky et sa Blower Bass… Ça fait du bien au son de Voivod, on ne le se cachera pas. Comment c’est arrivé tout ça?
Away: Après Infini, l’avenir de Voivod était assez incertain. En 2007, il y a eu un hommage à Piggy lors des fêtes du 25 ans du métal au Québec et Blacky et Mongrain sont montés sur scène pour faire un medley de Voivod. Moi et Snake étions parmi les spectateurs et on a été vraiment impressionné par leur performance. En 2008 quand on a eu l’invitation de jouer à Heavy MTL, on a alors pensé à eux. Nous avions l’intention de faire un spectacle ou deux, mais tout de suite après Heavy MTL, nous avons été invité à jouer dans un festival à Calgary avec Judas Priest et Ozzy, ensuite au Japon avec Testament. Finalement, ça n’a jamais arrêté. L’automne dernier, nous avons joué pour la première fois en Russie et les gens nous attendaient là-bas avec impatience. Ils scandaient le nom du groupe vingt minutes avant le début du spectacle! Ces trente années ont été toute une aventure malgré quelques tragédies, dont l’accident en Allemagne où notre chanteur de l’époque Eric Forrest a été blessé et bien sûr la mort de Piggy en 2005.
Boulevard Brutal: Je suis un fan de l’époque Eric Forrest. Quand tu écoutes maintenant les albums que vous avez fait avec lui (Phobos et Negatron), qu’est-ce que t’en penses?
Away: Je suis fier de ces albums, Phobos en particulier, par contre il est passé un peu inaperçu. Les ventes ont été faibles mais la tournée était intéressante. L’ancien bloc de l’est s’est ouvert au monde, on a fait des spectacles en Croatie, en Pologne, etc… Ce fut de beaux voyages, mais nous étions plus underground à cette période. C’est l’arrivée de Newsted qui a tout changé au début des années 2000.
Boulevard Brutal: Tu dis être fier de tous les albums de Voivod, mais est-ce qu’il y en a un que tu aimes moins?
Away: Non, mais je te dirais que mon préféré est Killing Technology. Il est vraiment représentatif de l’époque avec Tchernobyl, Reagan, la peur de la guerre nucléaire, la destruction de la planète, bref des termes recurrents chez Voivod. Cet album contient du progressif, du punk, du métal et je l’aime beaucoup.
Boulevard Brutal: Il y avait une rumeur à l’époque à laquelle vous deviez tourner un clip sur le Lac Rouge (immense lac de déchets toxiques situé derrière l’usine de Rio-Tinto à Arvida) et semble t-il que la compagnie ait refusé le tournage… Est-ce vrai tout ça?
Away: Je ne me souviens pas d’avoir voulu faire ça, mais ça aurait pu être vraiment cool!!! Cependant la compagnie n’aurait jamais voulu, ça aurait été honteux pour leur image. Aussi, c’était clôturé, donc difficile d’accès. Adolescent, on y allait en vélo et il fallait sauter par-dessus les clôtures. Et je suis pas mal sûr que ce n’était pas une bonne idée de se promener sur le bord du Lac Rouge…
Boulevard Brutal: Je crois d’ailleurs que ce lac est encore plus gros qu’à l’époque, vas voir ça sur Google Map, tu vas capoter.
Away: Ah ouais!!! Intéressant, je vais aller voir ça!!!
Boulevard Brutal: En terminant, qu’est qui s’en vient pour Voivod en 2013?
Away: Le festival South By Southwest à la mi-mars, mi-avril on va en Amérique du Sud, ensuite l’Amérique du nord. Cet été on va en Europe, ensuite l’Asie probablement en automne et en même temps on va essayer d’écrire un nouvel album… On va être très occupé pour 2013!
Vous pouvez entendre l’entrevue complète ici!!!! Entrevue audio Michel Langevin – Voivod
[…] dans sa voix que je n’avais pas entendu depuis Nothingface. Le batteur Away me mentionnait en entrevue la semaine dernière que le processus de création et d’enregistrement pour Target Earth […]